22 décembre 2018

Calais à la fin du XVe siècle

indice06-Calais 1347.png A la fin du XVe siècle, la ville de Calais est une colonie anglaise et ce, depuis 1347, soit déjà sept générations. En effet, lors de la guerre de Cent Ans, le roi Édouard III d'Angleterre, issu de la maison angevine des Plantagenêts, revendiquait la couronne de France. Après sa victoire à Crécy-en-Ponthieu en 1346, il cherche une ville portuaire pour y débarquer ses troupes Calais était protégée par des marais inondés à chaque marée, et défendue par une garnison placée sous le commandement d’un chevalier bourgignon, Jean de Vienne. Édouard III fit bloquer l’entrée du chenal avec des obstacles de toute nature et à partir de juin 1347, il fut impossible pour les Français de ravitailler Calais.

Pressé par la population assiégée depuis onze mois, Jean de Vienne demanda alors à négocier la reddition de la ville à condition d’épargner la population et la garnison : Edouard III accepta à la condition que six notables vinsent à lui, tête et pieds nus, avec une corde autour du cou pour être pendus : ce furent Eustache de Saint Pierre, Jehan d’Aire, Pierre de Wissant et son frère Jacques, Jean de Fiennes, et Andrieux d’Andres. Les bourgeois de Calais furent toutefois épargnés grâce à l’intervention de l'épouse d'Edouard III.

Au XVe siècle, donc, la ville est riche et bien protégée par des garnisons anglaises. Les marchands y sont bien établis, grâce notamment au commerce de la laine et prospèrent. Il s'agit d'un carrefour commercial majeur de la mer du Nord.

Sa population est d'environ 4500 habitants. De nombreux habitants sont employés par la Couronne Britannique pour les travaux de consolidation et d’aménagement, pour faire face aux tempêtes et aux moyens de défense. Elle attire également de nombreux étrangers (flamands et germaniques).

On construit alors le somptueux bâtiment de la Chambre du Conseil de Calais, en faisant venir 36 tonnes de pierre de Caen (de la plus belle sorte). Le bâtiment, résidence royale et maison des marchands, sera orné et décoré aux armes des Tudors. Les Anglais montrent qu'ils sont là pour rester.

La ville ne sera reprise par les Français qu'en 1558, soit après 210 ans d'occupation anglaise.

La Vauderie d'Arras

indice09-sabbat.jpgLa vauderie d'Arras est un vaste procès en sorcellerie de l'Inquisition médiévale qui se déroula de 1459 à 1461 à Arras, dans le Nord de la France.

Il est le premier des grands procès en sorcellerie qui marqueront les XVIe et XVIIe siècles. La ville fut en effet le théâtre d'une violente persécution dirigée contre des hommes et des femmes que l'inquisiteur du diocèse accusait de se rendre à la "vauderie", c'est à dire au sabbat des sorciers. Ce procès présente les particularités de s'être déroulé en milieu urbain et d'avoir mis en cause des personnes de toutes conditions sociales : non seulement des marginaux, mais aussi de riches marchands, des échevins et des hommes d'église. Sur 29 accusés (dont 10 femmes) 12 furent exécutés (dont 7 femmes).

Tout commence à la Toussaint de 1459 avec l'arrestation de Denisette Grenier à Douai et de Jean Tannoye à Abbeville. Transférés et emprisonnés à Arras, ils sont pris en charge par l'inquisiteur Pierre Le Broussart, et quatre vicaires généraux d’Arras. Loin de sa ville, l’évêque d’Arras est près du pape Pie II. Évoquant d'abord des beuveries, les accusés sont torturés et finissent par avouer leur participation active à la vauderie. Ils dénonceront alors des proches, croyant que c'était eux qui leur avaient envoyé l'Inquisition, et ainsi de suite.

A l'époque des faits, Arras faisait partie des Pays-Bas bourguignons : l'influence de ces derniers sur le premier procès y est donc manifeste. Trente ans plus tard, lors du procès en appel, le dernier duc de Bourgogne, Charles le Téméraire, étant mort, la mémoire des victimes fut réhabilitée par le Parlement de Paris, marquant la volonté du roi de France Charles VIII de renforcer l'influence du royaume de France sur ces territoires.

Le Marteau des Sorcières

indice03-malleus maleficarum.pngLe Marteau des Sorcières (Malleus Maleficarum) est un traité rédigé par deux inquisiteurs dominicains Henri Institoris et Jacques Sprenger, publié à Strasbourg en 1486. C'est un texte qui a été diffusé et ré-imprimé de façon très importante et qui a été longtemps utilisé dans le cadre de la chasse aux sorcières qui débute au XVe siècle en Europe.

Sa rédaction fait suite à une bulle du pape Innocent VIII de décembre 1484, mettant en garde contre la sorcellerie. Il s’agit d'un mélange de croyances préexistantes, souvent tirées de textes plus anciens comme le Directorium Inquisitorum de Nicolas Eymerich (1376), et le Formicarius de Johannes Nider (1435). L'arrivée de des techniques d'imprimerie permit de diffuser le manuel à grande échelle.

La première partie du livre traite de la nature de la sorcellerie. Une bonne partie de cette section affirme que les femmes, à cause de leur faiblesse et de l’infériorité de leur intelligence, seraient par nature prédisposées à céder aux tentations de Satan. Le manuel soutient que certains des actes confessés par les sorcières, comme le fait de se transformer en animaux ou en monstres, ne sont qu’illusions suscitées par le Diable, tandis que d’autres actions comme celles consistant à voler au sabbat, provoquer des tempêtes ou détruire les récoltes sont réellement possibles. Les auteurs insistent en outre de façon morbide sur les rapports sexuels que les sorcières auraient avec les démons.

La seconde partie explique comment procéder à la capture, instruire le procès, organiser la détention et l’élimination des sorcières. Cette partie traite aussi de la confiance qu’on peut accorder ou non aux déclarations des témoins, dont les accusations sont souvent proférées par envie ou désir de vengeance ; les auteurs affirment toutefois que les indiscrétions et la rumeur publique sont suffisantes pour conduire une personne devant les tribunaux et qu’une défense trop véhémente d’un avocat prouve que celui-ci est ensorcelé. Le manuel donne des indications sur la manière d’éviter aux autorités d’être sujettes à la sorcellerie et rassurent le lecteur sur le fait que les juges, en tant que représentants de Dieu, sont immunisés contre le pouvoir des sorcières.

L'ouvrage est très mysogine, à en juger par ces quelques extraits : « Les sorcières ne peuvent rien sans les démons et les démons ne peuvent rien sans les sorcières. » ou encore « Toutes ces choses de sorcellerie proviennent de la passion charnelle qui est insatiable chez les femmes. »

L'ouvrage fut réédité de nombreuses fois, et largement utilisé en Europe occidentale, malgré son interdiction en 1490, peu après sa publication, par l'Église catholique, en raison de de contradiction avec l'enseignement catholique en matière de démonologie.

Louis XI

Louis-XI.jpgLouis XI, dit le Prudent, est roi de France de 1461 à 1483. Il est le fils de Charles VII (dont le long règne est indissociable de l'épopée de Jeanne d'Arc) et petit-fils de Charles VI, dit le Bien aimé.

Son règne voit le rattachement de plusieurs grandes principautés mouvantes au domaine royal par des moyens parfois violents : territoires du duché de Bretagne (1475, traité de Senlis), des ducs de Bourgogne (1477, confirmé en 1482 par le traité d'Arras avec Maximilien Ier de Habsbourg), Maine, Anjou, Provence et Forcalquier en 1481, par la mort sans héritier de Charles V d'Anjou, et une partie des domaines de la maison d'Armagnac qui, brisée par l'affrontement avec le pouvoir royal, s'éteint peu après.

Son règne est le théâtre de nombreux affrontements, aussi bien politiques, militaires que judiciaires avec le duc de Bourgogne, Charles le Téméraire. Après le décès de celui-ci en 1477, et dans le cadre complexe de sa succession, Louis XI tente de reprendre les villes d'Artois qui devaient allégeance au royaume de France. Parmi elles, Arras, fut l'une des plus difficile à reprendre.

Arras au XVe siècle

Arras XIVe.png Arras est, à la fin du Moyen Âge une riche cité drapière qui a la particularité d'être coupée en deux. Il y a, d'une part, la Cité, le cœur historique gallo-romain, avec en son centre la cathédrale Notre Dame. Elle possède son échevinage, nommé par l’évêque et est entourée de remparts. Cette partie d'Arras est sous la protection du roi de France. Et il y a, d'autre part, la Ville, le vieux bourg monastique, qui s’est développé autour de l’abbaye de saint Vaast, et qui a prospéré plus vite que la Cité. Cette partie d'Arras possède aussi un échevinage, mais sous tutelle du duc de Bourgogne. Les deux parties de la ville étaient séparées par le rivière Crinchon, fortifiées l'une contre l'autre.

En 1477, le roi de France Louis XI envahit militairement les terres d’Artois ; il assiège Arras, qui résiste mais finit par céder. En 1479, Louis XI fait alors vider Arras de ses habitants et lui retire son nom (qui devient Franchise). La ville est alors repeuplée de familles de tout le royaume. Cette situation a fortement appauvrit la ville et même si le retour des Arrageois est autorisé à partir de 1482, elle restera longtemps affaiblie économiquement.

L'emblème d'Arras est le rat, pour l'association sonore entre l'animal et le nom de la ville. Au Moyen-Âge, d'ailleurs, on ne prononce pas le S final. Trois rats étaient représentés sur le blason d’Arras.

Au Moyen-Âge déjà, la ville possédait ses deux grandes places que l'on peut encore voir de nos jours : la place du petit marché et la grand place, reliées entre elles par la rue de la Taillerie. indice02-arras_1500.jpg

Les halles corporatives étaient regroupées place du petit marché depuis le XIIème siècle. La chapelle de la Sainte Chandelle, la Maison Rouge et son pilori occupaient le centre. Des fouilles récentes ont permis de situer précisément la place de la Maison Rouge : un marquage au sol au les pavés y matérialise l'emplacement. Les trouvères y donnaient leurs représentations théâtrales. Mais c'est aussi là qu'a été rendu public le jugement de la Vauderie d'Arras.

Quant à la grand place, elle était le centre principal de l'activité marchande dès le XIeme siècle et s'étendait déjà sur plus d'un hectare. Témoin de 1 000 ans d'histoire elle a vu se succéder au cours des siècles tournois, joyeuses entrées des princes et souverains, revues militaires. Son marché au grain prospéra jusqu'à la première guerre mondiale.