Autour des romans

Quelques billets autour de mes romans historiques, publiés chez Actes Sud, Imperiali Tartaro et Michel de Maule.

7 juillet 2008

Charles V

Charles V, roi de France Charles V, dit le Sage, roi de France.

Fils de Jean II, il assure la régence (avec ses oncles) pendant l'emprisonnement de son père à Londres, de 1356 à 1360, puis sera couronné à la mort de son père, en 1364.

Son règne marque la fin de la première partie de la guerre de Cent Ans : il réussit à récupérer toutes les terres perdues par ses prédécesseurs, restaure l'autorité de l'État et relève le royaume de ses ruines.

Charles V est un roi très instruit. Alors dauphin, son précepteur fut Nicole Oresme qui le sensibilisa aux auteurs classiques. Christine de Pisan le décrit comme un intellectuel accompli maîtrisant les sept arts libéraux. C'est aussi un roi très pieux, qui prend Saint-Louis comme modèle (restauration de la grandeur de l'état et du sentiment patriotique, mais aussi construction de la sainte-chapelle de Vincennes).

En 1356, lorsque son père est fait prisonnier, il n'a que dix-huit ans, mais bien des défis se présentent à lui. Il doit faire face à la révolte des bourgeois de Paris, conduits par Etienne Marcel, ainsi qu'à la Jacquerie dans le nord du royaume. Il doit également faire face à de nouvelles charges des Anglais. Paradoxalement, ces difficultés renforceront son image auprès des Parisiens. En effet, il parvient à éliminer ses ennemis sans faire couler le sang dans la capitale.

Le traité de Londres qui permet d'obtenir une paix relative avec l'Angleterre - et sa rançon de 4 millions d'écus pour le retour du roi Jean - oblige le royaume à se réorganiser. Avec Nicole Oresme aux finances, la création du franc, un système d'impôts efficace, et la réinjection des capitaux dans la population via une politique de grands travaux, ce qui crée de la richesse et des revenus réguliers pour l'état.

Ainsi, avec son fidèle Bertrand Du Guesclin, il peut alors se lancer dans une vaste reconquête des terres cédées aux Anglais. Ses troupes, mieux dirigées et mieux payées, voleront alors de victoire en victoire. Mais sa stratégie de reconquête n'est pas que militaire : elle est tout aussi diplomatique. Ainsi, il laisse venir le grand schisme d'occident pour mieux isoler l'Angleterre, et en janvier 1378, alors qu'il est victorieux sur tous les fronts, il reçoit son oncle l’empereur germanique Charles IV, afin de faire avaliser sa souveraineté et ses victoires par un des souverains les plus puissants d'Europe. Cette visite est grandiose ; elle est l'occasion de montrer que le roi de France est l'égal de l'empereur (le protocole est étudié pour cela).

Il meurt en 1380 et laisse à son fils le futur Charles VI, un royaume en bien meilleur état qu'il ne l'avait trouvé.

2 juillet 2008

La révolte des Maillotins

En 1382, les caisses de l'état sont vides. Le roi Charles VI n'a que 13 ans : ce sont, en fait, ses oncles qui règnent. Ces derniers décident alors de rétablir l’impôt sur le vin, le sel et la plupart des marchandises.

La rumeur gronde dans Paris, et très vite, le 1er mars au matin, un percepteur est assassiné aux Halles parce qu’il réclamait l’impôt à une marchande des quatre saisons.

C’est le signal, l’émeute gagne. Les émeutiers s’arment de maillets de plomb, et ces « Maillotins » vont alors saccager, piller et tuer. Vers midi, Paris est aux mains des émeutiers qui ferment les portes de la capitale, bloquent les rues par de lourdes chaînes. Au début, les bourgeois hansés s’associent à cette révolte fiscale, mais la tournure prise par les évènements les inquiète. Ils demandent une audience au duc de Bourgogne (un des oncles de Charles VI) pour obtenir l’abolition de l’impôt et l’amnistie pour les meurtres. Celui ci refuse, ce qui provoque la colère de la foule qui se dirige vers les prisons de la capitale, libère les prisonniers, saccage les édifices.

Une répression terrible va s'abattre sur les émeutiers dont les meneurs seront décapités ou pendus sans autre forme de procès. Cette véritable « révolte fiscale » débouche sur la loi martiale et incite Charles VI à reprendre les choses en mains. Dans un premier temps, il abolit l’impôt et accorde l’amnistie, mais pas pour les meneurs.

C'est alors qu'une révolte identique éclata à Gand, où l’armée écrase les insurgés flamands. Le roi peut alors s’imposer et affronter la révolte parisienne. Charles VI revient à Paris à la tête des troupes, les chaînes sont retirées et les Parisiens désarmés. Les arrestations et exécutions se succèdent.

En 1383, Charles VI rétablit l’impôt indirect, la révolte des Maillotins est définitivement écrasée.

1 juillet 2008

Le Château de Vincennes

Le Château de Vincennes est le plus important château fort royal français subsistant, et par la hauteur de son donjon (50 mètres), il est la plus haute forteresse de plaine d'Europe.

Les bâtiments médiévaux que l'on peut admirer de nos jours ont été construits sur une courte période, au XIVème siècle.

Les Capétiens prisaient déjà l'endroit. S'il n'en reste rien de visible, des fouilles attestent la présence d'un manoir médiéval qui se trouvait idéalement situé en bordure de l'immense forêt de Vincennes. L'endroit était parfait, pour surveiller Paris, tout en se détendant à la chasse.

Saint-Louis (Louis IX) y est même souvent représenté, rendant la justice sous un chêne. Ce roi diplomate et pieux entreposa même à Vincennes une partie des reliques de la Passion, ramenées de Terre Sainte.

le donjon du château de VincennesMais c'est surtout Jean II qui, de retour d'exil, ordonne la construction d'un gigantesque donjon afin d'asseoir son autorité retrouvée. Le 22 avril 1361, le roi nomme Jean Goupil «payeur des œuvres», c'est-à-dire gestionnaire du financement de la construction de cette tour. Ce que Jean II décide de construire est à la fois une résidence royale, un lieu de protection et un point d'appui militaire aux portes de Paris. Le donjon encore aujourd'hui dans un état remarquable, témoigne du génie de son architecte : Raymond du Temple. Ce programme multiple est alors tout entier dans le donjon et son enceinte : l'enceinte du château, entreprise en 1373, n'était pas prévue à ce stade.

Même si la construction fut achevée en un temps record en 1370, ce qui est remarquable pour une œuvre d'un telle complexité, Jean II n'en profitera pas, étant décédé en captivité à Londres. Ainsi, le donjon étonne par la puissance qu'il dégage de l'extérieur, mais aussi par la finesse et la richesse de sa décoration intérieure. La seule et fine colonne qui soutient les voûtes de chacune des pièces centrales de chaque étage encaisse un poids intelligemment réparti selon de très complexes et astucieux transferts de forces qui ont été récemment mis au jour, lors des travaux de restauration du donjon.

le château de Vincennes en 1380 Le lieu plaisait à Charles V, et il va décider de continuer les travaux, en lançant un autre projet titanesque : clore l'ensemble des bâtiments capétiens et le donjon en une gigantesque enceinte fortifiée. Cette enceinte fut réalisée dans sa totalité (avec ses neuf tours) dans le temps record de 8 ans, ce qui a dû impliquer une logistique de chantier incroyable, étant donné la quantité de pierres qu'il a fallu transporter, tailler et assembler. Il a sans doute dû s'agir du plus grand chantier de construction de toute l'Europe.

Ainsi, en quelques années, pour la construction, on a utilisé environ 260 000 blocs de calcaire d'une hauteur d'un pied, d'une longueur moyenne de 80 cm, d'une épaisseur de 50 à 70 cm : cela signifie l'arrivée en moyenne de 130 blocs par jour ouvrable. Sans compter les matériaux nécessaires pour les parements, les portes, les fenêtres, etc.

Le coût de construction du château fut considérable. Les quelques documents conservés permettent d'affirmer que le chantier, entre 1361 et 1380, coûta au roi plusieurs centaines de milliers de livres, cette énorme somme englobant les travaux proprement dits mais aussi les dépenses liées à l'agrandissement du Bois et aux aménagements intérieurs des constructions.

Car bien que réalisée en un temps très court, la construction fut d'une très grande qualité. Le soin apporté à l'assemblage, à joints fins, des pierres des parements extérieurs du donjon et de son châtelet et surtout de l'enceinte du château, est remarquable.

Enfin, en 1379, Charles V ordonne la construction de la Sainte-Chapelle, pour honorer la mémoire de son aïeul, et protéger les reliques de la Passion. Cependant, le roi meurt l'année suivante, et ce projet n'est pas repris pas son fils, Charles VI, jugeant trop dispendieuses les dépenses faites à Vincennes. La construction en reste au stade de fondation pendant de longues années, avant qu'elle ne reprenne timidement dans les années 1395, sans toutefois être achevée. Le chantier ne fut réellement achevé qu'en 1559 par Henri II.

Pour aller plus loin : chateau-vincennes.fr

30 juin 2008

La Peste Noire

Médecin soignant la peste noire La peste noire est une pandémie de peste bubonique qui a décimé la population européenne entre 1347 et 1350, atteignant un pic en France en 1348.

La peste s'est déclarée en Chine en 1334 et s'est rapidement répandue dans de nombreuses provinces chinoises, puis, via les Mongols qui commerçaient avec les Gênois, elle est arrivée en Europe, notamment à Gênes et Marseille fin 1347. En un an, tout le pourtour méditerranéen fut atteint.
La peste noire se répand alors comme une vague, mais elle ne s'établit pas durablement aux endroits touchés. Le taux de mortalité moyen d'environ 30 % de la population totale (et de 60 à 100 % de la population infectée) est tel que les plus faibles sont vite tués, et le fléau ne dure en moyenne que six à neuf mois.
Les médecins étaient tout à fait impuissant face à ce fléau. Comme on ne connaissait pas les causes du mal, on ne soignait pas les malades et on n'ensevelissait pas les morts, ce qui favorisait la contagion.
Depuis Marseille, la peste gagne rapidement Avignon, alors cité papale et carrefour du monde chrétien, ce qui lui donne une formidable plateforme de diffusion. Elle atteint Paris en juin 1348, et en décembre 1348, toute l'Europe méridionale de la Grèce au sud de l'Angleterre est touchée. En décembre 1349, la peste a traversé presque toute l'Allemagne, le Danemark, l'Angleterre, le Pays de Galles, une bonne partie de l'Irlande et de l'Écosse. Elle continue ensuite sa progression vers l'est et vers le nord dévastant la Scandinavie en 1350, puis se perd dans les vastes plaines inhabitées de Russie en 1351.

Si la peste anéantit la population, elle marque durablement les esprits. Certains y voient la marque de l'Apocalypse, d'autre en profitent pour exacerber les haines contre les juifs, ou les gens du voyage, d'autre encore s'en inspirent pour en faire des oeuvres d'art (c'est en 1350 que le poète italien Bocace décrira dans son chef d'œuvre Le Décaméron un groupe de jeunes nobles fuyant la peste pour se raconter des histoires grivoises...). La peste noire marque également un tournant dans l'appréhension de la mort. Devenant un fait quotidien, l'imagerie de la mort (squelettes, gisants...) se développe, notamment au travers de représentations de la Danse Macabre.

Jean Fusoris

Astrolabe de Jean Fusoris Jean Fusoris, 1365 - 1436

Jean Fusoris a été le premier à commercialiser les astrolabes à Paris et au moins 13 de ses instruments lui ont survécu (l'astrolabe ci-contre est l'un d'eux). Il est, en outre, réputé pour avoir amélioré de façon significative la conception de ces appareils.

Tout jeune, Jean Fusoris fut un brillant élève. Très tôt diplômé de médecine à la faculté de la Sorbonne à Paris (il n'a que quinze ans), il n'exercera cependant pas son art, préférant se pencher sur la "haute technologie" de l'époque, comme les horloges par exemple. C'est un touche-à-tout qui s'intéresse à de nombreux sujets, des mathématiques à l'astrologie.

Dans les années 1380-1390, il ouvre une boutique ainsi qu'un atelier d'instruments scientifiques à Paris, vendant et fabriquant des astrolabes, des horloges et d'autres instruments techniques de navigation ou de précision. Il devait sans doute passer pour un original, tant ces objets devaient paraître étranges et chers aux habitants de son quartier.

Mais Fusoris continua d'étudier. De plus, il cumulait diverses charges officielles auprès du roi. Il fut notamment élu membre de l'ambassade française en Angleterre. Ainsi, on sait qu'en 1415, il a rencontré Richard de Courteny, évêque de Norwich qui lui a acheté un astrolabe mais ne l'a pas payé. Quand Fusoris est revenu en Angleterre pour récupérer l'argent, en raison des tensions entre la France et l'Angleterre dues à la guerre de Cent Ans, il fut arrêté pour espionnage à son retour. Il s'est alors exilé à Mézières-sur-Meuse, puis plus tard à Reims.

Pendant son exil, il a continué à honorer des commandes pour des instruments scientifiques. Fusoris a écrit un traité sur l'astrolabe dans lequel il a détaillé les améliorations qu'il a incorporées à ses instruments, ainsi que sur d'autres sujets de mathématiques et d'astronomie.

Dans le roman, le lien de parenté entre Raymond du Temple et Jean Fusoris est fictif.

les Turlupins

Le mouvement des Turlupins s'inscrit dans la lignée des courants de pensée dits de "libre-esprit" qui essaimèrent en Europe à partir du XIIème siècle.
A l'instar d'autres mouvements comme les Cathares, les Vaudois, mais aussi les Templiers, ou les Franciscains, les Turlupins prônaient un idéal de pauvreté. C'était un ordre mendiant, poussant la notion de pauvreté au paroxysme, en vivant nus la plupart du temps.
Dans la doctrine turlupine, la pauvreté doit laver l'homme de tout péché et ressusciter le Christ en lui. C'est donc en écoutant ses propres désirs que l'homme entrera dans l'ère de "l'Esprit libre" où il pourra connaître la béatitude dès la vie terrestre. La charité se confond ainsi avec l'amour charnel qui se consomme sans restriction au sein de la communauté. Pour les Turlupins, une femme enceinte l'est par l'opération du Saint-Esprit.
Sur le plan philosophique, les Turlupins aspirent à la pauvreté intellectuelle (beati pauperes spiritu). L'esprit qui devient vacant permet de mieux recevoir Dieu.
La première condamnation papale remonte à 1204, et l'Inquisition n'aura de cesse de les pourchasser. Mais peu enclins au martyr, les Turlupins n'hésitent pas à feindre la dévotion la plus conforme et s'abstiennent de prosélytisme. C'est ainsi qu'ils échappent la plupart du temps aux épurations et se maintiennent au fil des siècles sans que l'on puisse dire que leur mouvement ait réellement pris fin à un moment précis.
Les procès et les documents historiques sont donc rares, mais on connaît, par exemple, l'exemple de Marguerite Porète, qui fut brûlée vive en place de Grève à Paris, le 1er juin 1310 avec le livre qu'elle avait écrit (le Mirouer des simples ames anienties). C'est donc surtout par les sources inquisitoriales que l'on peut se représenter leur doctrine, bien que le fantasme de l'inquisiteur devait certainement orienter les aveux.

Protagoniste du roman, Jeanne Daubenton est un personnage historique, dont la chronologie a été adaptée pour satisfaire les ressorts de l'intrigue.
De fait, on sait peu de choses sur elle. Les documents de la ville de Paris révèlent qu'elle fut brûlée vive, elle aussi, en 1372, en place de Grève. On dit qu'elle allait entièrement nue, et qu'elle proférait qu'il n'y a nul péché à satisfaire ses passions et tous les désirs des sens....

Jean II

Jean II, roi de FranceJean II, dit le bon, roi de France
Fils de Philippe VI, il lui succède à sa mort en 1350.
Il est le tout premier roi de France dont il reste un "vrai portrait", que l'on peut admirer au Louvre.

Jean II est un chevalier aimant les batailles. Mais son règne commence dans une situation difficile, avec la peste noire qui vient de sévir, et les Anglais qui ont remporté une victoire à Calais.
La guerre avec l'Angleterre bat son plein, mais elle tourne au désastre à Poitiers, où il est fait prisonnier, et emmené à Londres. Son fils aîné, le dauphin, futur Charles V, est évacué et regagne Paris.
Ce dernier, devant faire face trop jeune à la réalité de son pays, il affronte un ennemi extérieur, mais aussi un ennemi intérieur avec le prévôt des marchands, Etienne Marcel qui menace de renverser le pouvoir royal...

Rapidement, un traité de paix (la paix de Bretigny) est signé avec l'Angleterre. Catastrophique pour la France, la couronne fait de nombreuses concessions en offrant tout l'ouest du pays, mais également en promettant de régler une rançon astronomique de trois millions d'écus, pour récupérer le roi.
Les difficultés financières obligent l'état de s'organiser. Grâce à de grands économistes comme Nicole Oresme, les finances sont remises en ordre de marche, et une nouvelle monnaie sera lancée pour lever l'impôt de la rançon : ce sera le premier "franc", dit franc à cheval, représentant le roi.

De retour à Paris en 1360, Jean II retrouvera sa vie fastueuse, en lançant, par exemple, la construction du gigantesque donjon de Vincennes. Mais en 1364, un de ses fils s'étant évadé des geôles londoniennes où il était encore tenu, Jean II décide de se rendre à Londres en échange, mais aussi pour pouvoir renégocier le désastreux traité de Bretigny. Il sera logé dans un luxueux palais avec son fils le duc de Berry. Il y mourra quelques mois plus tard.

27 juin 2008

Le grand schisme d'occident

Le grand schisme d'occident fut une crise pontificale qui divisa la Chrétienté catholique en deux obédiences pendant quarante ans.

Le 5 juin 1305, les cardinaux, réunis en conclave à Pérouse, portèrent à la tête de l'Église Bertrand de Got qui choisit le nom de Clément V. C'est le premier pape français depuis l'élection de Sylvestre II en 999. Clément V fait son possible pour se concilier les bonnes grâces du puissant Philippe le Bel, roi de France, y compris lors du procès en inquisition contre les moines-chevaliers Templiers, le vendredi 13 octobre 1307.
En raison des luttes incessantes entre les cardinaux et l'Empereur du Saint-Empire Germanique, mais également pour montrer sa proximité avec le roi de France, Clément V décide alors en 1309, de s'établir «provisoirement» dans un couvent de dominicains à Avignon, sur des terres d'Empire qui lui sont cédées par le roi de Sicile, par ailleurs comte de Provence.

Cinq papes s'y succèderont et feront alors d'Avignon une cité puissante. De «provisoire», leur installation deviendra permanente.
Mais soixante ans plus tard, Gregoire XI (pape français) se met les Florentins à dos en excommuniant tous les habitants de la ville sous prétexte qu'ils ne veulent pas se soumettre à l'impôt pontifical. Pour tenter de se réconcilier avec les cardinaux italiens, il envisage de ramener la papauté à Rome, et effectue plusieurs voyages entre les deux villes. Mais, en 1378, gravement malade, c'est à Rome qu'il meurt.
Le Sacré Collège procèdera alors à l'élection d’Urbain VI, cardinal italien qui entamera son pontificat par une série de mesures controversées et violentes à l'égard des cardinaux français d'Avignon. Ceux-ci, outrés par son attitude, élisent alors l'un des leurs, le pape Clément VII.
Pendant trente-cinq ans s'ensuivra alors une période sombre pour l'église catholique puisque les deux papes et leurs successeurs s'excommunieront mutuellement. Chaque royaume apportait alors son soutient à l'un ou à l'autre pape, au grès des querelles, des rivalités ou de ses stratégies d'alliances.
En 1409, afin de dénouer cette crise majeure, un concile est tenu à Pise. L'objectif est que les deux papes démissionnent et qu'un nouveau pape soit élu. Mais la crise empire, est ce sont alors trois papes qui prétendent au trône suprême, et ce, pendant huit années encore, jusqu'au décès presque concomitant des trois protagonistes.
La crise prend fin en 1418 lorsque Martin V est élu par un conclave composé de cardinaux, de représentants de l’Empire, et des royaumes d’Angleterre, d’Espagne, de France, des seigneuries d'Italie, avec l’appui du concile. Il s’installe à Rome en 1418, mettant ainsi fin au Grand Schisme.

La Grande Boucherie

Rive droite de la Seine à Paris, lorsque le Grand Châtelet avait encore un rôle défensif, se tenait au nord du bâtiment militaire, une des portes de Paris, qui est devenue, avec l'extension rapide de la population et par homonymie, la place de l'Apport.
Cette place fut longtemps le théâtre de commerces de tous genres, avant que celui ci ne s'organise par les Bouchers.
Entre les rues Saint-Jacques et Saint-Denis, à la place de l'actuelle rue de Rivoli, se construisit, avec l'aval du roi, un imposant édifice. Sa situation extra-muros, mais près d'un axe de passage, répondait à une double considération, tant hygiénique, que pratique.
La grande boucherie du Châtelet (place de l'Apport) La Grande Boucherie comprenait trois niveaux. En premier lieu, les caves où étaient entreposées des instruments, des détritus et même quelques bonnes bouteilles de vin de Bourgogne. Le rez-de-chaussée était surélevé de trois ou quatre marches et présentait des étals disposés le long de deux allées se coupant à angle droit. La lumière provenait de hautes baies dépourvues de vitres. L'éclairage artificiel était interdit : il pouvait donner un faux aspect aux viandes. Enfin, à l'étage était installée une salle des fêtes, pour les intronisation de la corporation des Bouchers, ainsi qu'une petite chapelle privée.

Il s'agissait sans doute de l'un des lieux de contre-pouvoir les plus importants de Paris, face au Louvre (pouvoir royal) et à Notre Dame ou à la Sorbonne (pouvoir religieux). Les bouchers étaient en effet les marchands les plus riches et les plus puissants de Paris.

L'église attenante à la Grande Boucherie portait d'ailleurs l'empreinte de la puissante corporation : Saint-Jacques-de-la-Boucherie.

Aubry Haussecul, personnage fictif du roman, est un des bouchers qui y travaille, de père en fils depuis plusieurs générations. Son nom provient d'un mélange entre deux personnages historiques : un boucher du XIIIème qui a donné son nom à la rue Aubry-le-Boucher, dans le IVème arrondissement, et un certain Guillaume Haussecul, riche boucher du XVème siècle qui est mentionné dans plusieurs papiers pour avoir fait construire une chapelle attenante à sa boucherie.

Pour aller plus loin, on consultera le très complet site de sur l'histoire de la Grande Boucherie du Châtelet : grande-boucherie.chez-alice.fr

26 juin 2008

Christine de Pisan

Christine de PisanChristine de Pisan est une écrivaine et poétesse née en 1364 à Venise.
En 1368, elle suit son père Thomas de Pisan, astrologue réputé, appelé à la cour du roi Charles V.

Après le décès de son père, puis de son mari, Christine se retrouve sans appui ni famille à la cour. Réduite à la pauvreté et devant essuyer plusieurs procès pour dettes, elle se résout à travailler pour nourrir ses enfants et choisit le métier d’homme de lettres (elle dira elle même que "de femelle devins masle").
Christine se réfugie alors dans l’étude et compose une série de pièces lyriques compilées dans Le Livre des cent ballades qui obtiennent un franc succès. Ces pièces pleurent son défunt mari :

''Seulette suis et seulette veux être,
Seulette m’a mon doux ami laissée,
Seulette suis, sans compagnon ni maître,
Seulette suis, dolente et courroucée...''

Christine de Pisan obtient alors des commandes et la protection de puissants comme Jean de Berry et le duc Louis Ier d’Orléans. Elle prend alors de l’assurance et s’attelle à la rédaction d’écrits érudits philosophiques, politiques, moraux et même militaires. Elle s’engage alors parallèlement dans un combat en faveur des femmes et notamment de leur représentation dans la littérature. Elle s’oppose en particulier à Jean de Meung et à son Roman de la Rose, alors l’œuvre littéraire la plus connue, copiée, lue et commentée en Europe occidentale.

Dénonçant l'abaissement et le délitement du royaume durant la guerre civile entre les Armagnacs et les Bourguignons, elle rédigea une œuvre magistrale et précieuse pour les historiens actuels, Faits et actes du sage Roy Charles Quint, biographie riche en détails sur le règne de son mentor, Charles V de France.

La plupart de ses œuvres sont conservées dans des manuscrits autographes, ce qui est très rare pour cette époque.

Féministe avant la lettre, Christine de Pisan en effet attribue l'inégalité intellectuelle entre hommes et femmes non à la nature, mais à l'éducation et aux représentations d'elles-mêmes fournies aux femmes par le discours misogyne dominant.